Saint Omer

Séance du
  • Réalisation: Alice Diop
  • FR, 2022
  • 122 minutes
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Saint Omer

Rama, une jeune romancière, assiste au procès de Laurence Coly à la cour d’assises de Saint-Omer. Cette dernière est accusée d’avoir tué sa fille de 15 mois en l’abandonnant à la marée montante sur une plage du nord de la France. Cependant, au cours du procès, la parole de l’accusée, l’écoute des témoignages font vaciller les certitudes de Rama et interrogent notre jugement.

Générique

Réalisation
Alice Diop
Scénario
Alice Diop, Amrita David, Marie NDiaye
Production
Toufik Ayadi, Christophe Barral
Photographie
Claire Mathon
Montage
Amrita David
Musique
Thibault Deboaisne
Interprétation
Kayije Kagame (Rama), Guslagie Malanda (Laurence Coly), Valérie Dréville (la juge), Aurélia Petit (Maître Vaudenay), Xavier Maly (Luc Dumontet), Robert Cantarella (l’avocat général), Salimata Kamate (Odile Diatta), Thomas de Pourquery (Adrien)
Origine, année
FR, 2022
Durée
122 minutes
Distribution
Cineworx

Citation

D’un fait divers terrible, la cinéaste déploie un film de procès dont la cohérence entre parole et mise en scène tire le huis clos vers l’expérience collective puissante.

Marilou Duponchel
Les Inrockuptibles, 21.11.2022

Commentaires

Mettre en puissance les outils du cinéma au service d’une sublimation du réel, de la recherche d’un état de grâce, tel est le projet de «Saint Omer», film de procès et réinterprétation du mythe de Médée. La quasi-entièreté du film se situe entre les murs de la cour d’assises de Saint-Omer, petite ville du Pas-de-Calais où Rama, par son allure citadine et sa peau noire, fait figure d’intruse. Venue là pour nourrir l’écriture d’un roman, la jeune femme transite entre sa chambre d’hôtel et le tribunal. De ces lieux clos émane une sensation étouffée d’un monde à côté du monde, le bruit du dehors comme intercepté par l’omniprésence du bois, de la poussière des rideaux, d’un clair-obscur dont tout le film est baigné et qui vacille et palpite comme les battements d’un cœur.
«Saint Omer» est un film de parole, et même de langage, mais pas un film bavard. Il se compose d’une poignée de séquences dans lesquelles l’accusée Laurence Coly, avec sa langue d’érudite, qui lui vaudra l’étonnement d’une partie de l’auditoire chargé de tout un impensé raciste, raconte sa vie d’avant le meurtre dans laquelle on voudrait trouver les indices de son geste. Mais c’est aussi une œuvre qui sait accueillir le silence comme rarement et filme avec une très grande intensité les femmes de ce tribunal qui s’écoutent et se taisent. [...] «Saint Omer», plutôt que l’état de sidération engendré par tout ce qui est par définition inentendable, finit par produire un effet de reconnaissance. Il y a d’abord celle éprouvée par Rama envers Laurence, puis un pacte secret, entre elle et nous, entre toutes les femmes, les tondues, les brûlées au bûcher, les mauvaises, les monstrueuses, tout l’héritage d’être femme se fait, et c’est à une grande catharsis, pour pleurer nos mères, que la banale petite cour d’assises assiste.

Marilou Duponchel
Les Inrockuptibles, 21.11.2022

De quelles souffrances tues, de quel legs maternel pesant, de quels non-dits, sommes-nous le produit ? La question de la maternité – c’en est même la clé – sous-tend ce film politique et radical récompensé par une flopée de prix. Avec Claire Mathon, sa cheffe opératrice, Alice Diop choisit de longs plans-séquences pour placer le spectateur dans une situation d’écoute maximale, préfère parfois scruter les réactions de l’auditoire à ce qui est dit, fait confiance à Bresson ou Depardon, convoque la peinture de Rembrandt et de Vinci, glisse, à la fin de «Saint Omer», un extrait du mythe de Médée revu par Pasolini. Aidée de comédiennes sensationnelles, [...] Alice Diop signe un film puissant où, soumise à la pression parentale, invisibilisée par son mari, en proie à un racisme insidieux (le témoignage de sa prof de philo prompte à se demander comment une femme comme elle peut s’intéresser au philosophe Wittgenstein), Laurence Coly n’est ni tout à fait coupable ni tout à fait victime.

Sophie Grassin
L’Obs, 23.11.2022

Récompenses

2022
Festival 2 Valenciennes: Prix du jury
2022
Festival du film de Gand: Grand Prix du meilleur film
2022
Mostra de Venise: Lion d’argent, Prix Luigi De Laurentiis
2022
Prix Jean-Vigo: Meilleur film
2022
Prix Louis-Delluc: Meilleur film
2023
César : Meilleur premier film

Filmographie

2006
La tour du monde (doc)
2007
Les Sénégalaises et la Sénégauloise (doc)
2011
La mort de Danton (doc)
2016
La permanence (doc)
2016
Vers la tendresse (doc)
2021
Nous (doc)
2022
Saint Omer